Anna vous raconte
Avez-vous croisé au Mans ces grosses boîtes en métal foncé humblement nommées « Boîtes à livres » ? Boîtes aux trésors, aux petits bijoux de la littérature, aux surprises… Si oui, avez-vous pris le temps d’en ouvrir une ?
Lorsque j’ai emménagé au Mans, mon premier réflexe a été de retourner au Gué-de-Maulny pour aller fouiller dans le frigo à livres (oui un frigo) que j’avais repéré lors de ma toute première venue en Sarthe. Mais plus de frigo. Tristesse… Je suis une ancienne libraire alors des livres j’en ai toujours une pile immense qui m’attend au pied de la cheminée. Mais tout de même… Ca me chagrinait. Je finis mon histoire et je vous explique pourquoi.
A la fin de l’été, je reçois une invitation de la Jeune Chambre Économique du Mans pour l’inauguration d’une boîte au Jardin des Plantes ! Mon jardin préféré ! Une belle grosse boîte solide, mise à l’abri des intempéries que peuvent subir les parcs :
Depuis elle a eu 4 soeurs dont vous trouverez les emplacements ici :
http://www.jce-lemans.org/boites-a-livres/
Maintenant, passons aux choses plus sérieuses.
Quel est le principe d’une boîte à livres ?
La boîte est en libre accès. Vous l’ouvrez, vous choisissez les lectures qui vous donnent envie et vous repartez avec. Il n’y a aucune obligation de déposer un livre en contrepartie. Le jour où vous avez envie de donner un livre, vous avez juste à le déposer soigneusement dans la boîte. Aucune contrainte. Tout est libre et gratuit.
Quel est leur intérêt ?
Je vais vous donner mon point de vue d’ancienne libraire. 9 ans à conseiller des clients, à les voir évoluer au milieu des livres mais aussi à observer leur entrée dans la librairie. En sachant que je travaillais dans une enseigne avec un très fort capital sympathie où il est agréable de passer du temps.
N’avez-vous jamais hésité à franchir le seuil d’une boutique qui vous semblait inaccessible ? Personnellement, je n’ai jamais osé rentrer dans une des boutiques de la Croisette à Cannes. Trop en décalage avec mon univers même si je vivais à deux pas. Hé bien, beaucoup de personnes n’osent pas franchir l’entrée d’une librairie. Et lorsqu’elles le font enfin parce qu’il faut bien acheter Candide au fiston pour le collège, elles se sentent perdues et dépassées. Elles ne se sentent pas au niveau. Elles me le disaient elles-mêmes. Je ne les voyais pas fureter et regarder les romans autour d’elles. Mais ça ne veut pas dire qu’elles ne lisent aucun bouquin. Elles lisent ceux qu’elles trouvent, qui sont donnés par le beau-frère, la grand-mère, la cousine, etc… Alors pouvoir choisir soi-même dans une boîte à livres… Quelle chance ! Aucun classement obscur à déchiffrer, pas de marketing dans tous les sens, pas de libraire qui tourne et virevolte (oui je virevoltais moi). Juste une boîte et des bouquins. Reste à lever la petite inhibition qui empêche d’ouvrir la boîte un peu trop exposée aux regards des passants.
Autre phénomène que je vivais chaque jour : les lecteurs au chômage, en grande situation de précarité qui passaient des heures à lire en rayon ou à la machine à café et qui ne pouvaient pas s’offrir un seul bouquin. Ici nous avons un super réseau de médiathèques mais ce n’est pas le cas partout. Alors ils lisaient dans la librairie. A l’époque il n’y avait encore aucune boîte à livres dans les communes du Sud où je vivais et travaillais. Depuis ils en ont installé.
Et puis il y a tous ceux qui ne lisent pas, mais qui par curiosité ou ennui en ouvriront une, un jour, et qui se diront « Allez, pourquoi pas ! » et qui repartiront avec un livre qu’ils liront. S’il y en a qu’un seul lu, tant pis. Mais il y en aura eu un.
Avant d’entrer dans la vie active, je lisais entre 4 et 10 livres par semaine. Un peu moins en commençant à travailler. Quand je suis devenue libraire, naïvement je pensais que tout le monde lisait au moins quelques pages dans la semaine… Au fil des mois, j’ai entendu une dame me dire que Molière venait dédicacer dans l’école de sa fille, un monsieur faire semblant de savoir lire les titres des ouvrages devant lui, et puis un jour une cliente est venue me demander les livres que je lisais moi-même car elle voulait être capable de s’exprimer aussi bien que moi. Alors là j’ai été mal… Une sacrée prise de conscience !
Je ne dis pas que la boîte à livres est LE remède magique et absolu. La volonté est l’ingrédient principal. On ne peut pas obliger les (futurs) citoyens à lire. Mais avoir un accès libre, gratuit, dans un lieu ouvert et anonyme, à l’objet livre, est fondamental pour respecter le principe d’égalité des chances. Avec bien sûr des valeurs de partage qui s’entremêlent à ce droit à l’accès à la culture pour tous.
Hier j’ai déposé quelques livres dans celle du Jardin des plantes. A droite sur la photo. Des romans de la rentrée littéraire 2017 et du développement personnel. Elle est bien pleine cette semaine encore. Soigneusement rangée aussi. Ce n’est pas pour rien que c’est ma préférée !
Vous me direz le(s)quel(s) vous avez choisi ? Hier j’ai pris L’enfant et la rivière de Bosco, dans la même édition que je possédais enfant :
Bonne lecture !
Celle de la place de la République est pas mal aussi 🙂
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bel article,
un nouveau arrive..
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